La polémique autour de la gestion des fonds publics par l'administration du maire de Marseille, et sénateur des Bouches-du-Rhône, Jean-Claude Gaudin (UMP), redouble. Dans un rapport qui chiffre le montant de la dette de la deuxième ville de France à 1,8 milliard d'euros, la chambre régionale des comptes vient de se montrer sévère, dénonçant notamment "une fiabilité des comptes affectée par diverses pratiques irrégulières", une dette de 500 000 euros de TVA envers l'Etat et, surtout, une gestion catastrophique pour les finances publiques de la rénovation du Stade-Vélodrome.
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Interpellé à plusieurs reprises par la presse, M. Gaudin a donné rendez-vous à tous ceux qui voulaient l'attaquer sur ces questions au prochain conseil municipal du lundi 7 octobre. Le rendez-vous risque d'être encore plus explosif que prévu. Ce jour-là, en effet, la ville de Marseille compte également faire valider une nouvelle dépense polémique : l'achat pour 37,6 millions d'euros de l'Immeuble Allard, un "bâtiment à construire" de 10 000 mètres carrés de bureaux.
Le rapport 340, glissé dans une annexe des 364 délibérations qui seront étudiées en cinq heures ce matin-là, prévoit l'acquisition au groupe Eiffage d'un "ensemble de 9 étages", dans la nouvelle zone d'aménagement Euroméditerranée 2. Selon la mairie de Marseille, ce site permettra la réunion en une seule localisation de plusieurs services municipaux actuellement disséminés sur différents sites. "Cet achat, c'est d'abord une décision politique, assume l'adjoint aux finances, Jean-Louis Tourret (UMP), pour marquer notre soutien au démarrage d'Euroméditerranée 2. Mais nous comptons aussi financer cet achat à 10% près, par la vente des bâtiments qui seront libérés et l'arrêt de certaines locations. Nous devrons payer le nouvel immeuble avant de vendre, mais ce décalage, nous l'assumons."
MENNUCCI DÉNONCE LE "CADEAU FAIT À EIFFAGE ET À LA BNP"
Dans l'opposition, ça gronde. Personne n'avait entendu parler de cet investissement lourd, à quelques mois des municipales de 2014, et l'on doute que l'équation soit si positive. "C'est désespérant de constater que malgré tout ce que la chambre régionale des comptes a relevé comme éléments de mauvaise gestion, de manque de transparence et de dépenses inutiles de fonds publics, Jean-Claude Gaudin continue à procéder de la même manière", attaque le député Patrick Mennucci, en lice pour la primaire qui désignera le candidat PS aux municipales. "Le prix de cet achat me paraît énorme, enchérit Samia Ghali, sénatrice en course, elle aussi, pour l'investiture socialiste. Installer des services municipaux dans les quartiers Nord est une bonne chose, mais à ces tarifs-là, c'est très cher payé. On aurait pu construire sur des terrains municipaux pour moitié moins."
Dénonçant un "cadeau fait à Eiffage et à la BNP", courtier immobilier de l'opération, M. Mennucci estime également que ces regroupements de services municipaux ne sont "en rien une priorité" dans une ville qui affiche "un retard évident en matière d'infrastructures culturelles, sportives ou sociales".
Cette délibération rappelle celle prise par la communauté urbaine Marseille-Provence Métropole (MPM) en octobre 2012. Son président, Eugène Caselli (PS), lui aussi candidat à la primaire, avait fait voter la location pour douze ans de 12 étages de la tour "La Marseillaise", un gratte-ciel construit sur le front de mer par la société Constructa, pour plus de 7 millions d'euros par an. Cette décision avait été contestée par plusieurs élus, dont déjà le député Patrick Mennucci. Le 22 juillet dernier, le tribunal administratif de Marseille a rejeté les recours déposés par des contribuables contre Marseille-Provence Métropole, validant le choix du président Caselli. Décision qui intervient alors que la nouvelle localisation du siège de la future métropole Aix-Marseille, qui fera disparaître MPM, n'a pas été tranchée par l'Etat.